Réponse du catéchumène : C’est la bonté.
D. Qu’entendez-vous par la bonté de Dieu ?
R. Ce penchant qui le porte à faire du bien aux êtres intelligents.
D. Comment prouvez-vous que Dieu est bon ?
R. Je ne puis jeter les yeux sur aucun objet qui ne me prouve cette bonté.
D. Expliquez-vous.
R. Dieu m’a donné l’être, sans lequel je ne serais pas susceptible de bonheur [1] ; c’est un effet des bontés divines. Dieu a constitué mon corps de telle sorte que ce qui contribue à sa conservation me cause du plaisir, afin que je sois porté à me conserver, au lieu que [2] ce qui peut contribuer à le détruire me cause de la douleur afin que je sois porté à l’éviter. Dieu m’a donné un esprit avec les qualités propres à me faire connaître qui est mon Créateur, ce que je suis, ce que je dois pratiquer, et ce que je deviendrai un jour ; c’est un effet des bontés divines. Surtout, c’est Dieu qui m’a donné une conscience qui me fait discerner le vice d’avec la vertu, et qui me rend capable d’imiter la justice, la sainteté, la charité de celui qui m’a formé ; c’est encore un effet des bontés divines.
D. Mais si les biens dont les hommes jouissent vous prouvent que Dieu est bon, les maux dont ils sont affligés ne vous persuadent-ils pas qu’il manque de bonté ?
R. Point du tout.
D. Mettez votre pensée dans un plus grand jour.
R. On peut ranger en trois classes tous les maux que les hommes souffrent. La première contient les maux qui sont essentiels à la nature humaine, la seconde ceux que Dieu nous envoie pour nous sanctifier et pour nous instruire, les troisièmes sont infligés aux méchants pour les châtier de leurs crimes. Aucun de ces maux ne saurait fournir de preuve à cette abominable pensée que Dieu manque de bonté.
D. Qu’entendez-vous par les maux qui sont essentiels à la nature humaine ?
R. Ceux qui viennent du dérèglement des saisons, de l’intempérie de l’air, des bornes de notre esprit, des infirmités de notre corps.
D. Comment concevez-vous que Dieu est bon, quoi qu’il expose les hommes à ces sortes de maux ?
R. Si cette vie était éternelle, j’aurais peut-être de la peine à résoudre cette difficulté, mais je conçois que Dieu peut dédommager dans l’éternité une créature intelligente qui aura supporté avec patience les maux auxquels il aura jugé à propos de l’exposer.
D. Qu’entendez-vous par les maux que Dieu nous envoie pour nous sanctifier et pour nous instruire ?
R. Des afflictions extraordinaires auxquelles il expose souvent les personnes qui lui sont les plus chères, et qui travaillent avec le plus d’effort à lui obéir : la perte de leurs proches, le délabrement de leur fortune, les calomnies dont on noircit leur réputation, les trahisons qu’on leur fait, et diverses autres calamités du même genre.
D. Comment concevez-vous que Dieu est bon, quoi qu’il vous expose à ces sortes de maux ?
R. C’est que ce sont les moyens les plus propres pour nous conduire aux véritables biens : ils contribuent à nous humilier, à nous faire connaître notre dépendance, à nous rendre plus sensibles aux malheurs de nos semblables ; surtout, ils nous montrent le peu de fonds [3] que nous pouvons faire sur la vie présente. Ils nous portent à en recherche une plus solide et plus permanente.
D. Qu’entendez-vous par les maux que Dieu inflige aux méchants pour les punir de leurs crimes ?
R. J’entends ceux qui portent avec eux un certain caractère d’horreur, tel qu’est une mort violente, qui, étant destituée de marque de retour en grâce avec Dieu, doit faire craindre à ceux qui la subissent de grands châtiments après cette vie.
D. Comment concevez-vous que Dieu est bon, quoi qu’il expose quelques-unes de ses créatures à de si grands maux ?
R. Quand je dis que Dieu est bon, je n’entends pas qu’il fasse toujours du bien à des êtres qui ne s’emploient jamais à s’en rendre dignes. La bonté de Dieu n’est pas opposée à sa sainteté, et sa sainteté demande qu’il mette une différence sensible entre ceux qui auront fait une étude continuelle de ses lois, et ceux qui les auront violées avec obstination et avec insolence.
On chantera après cette Section le second et le troisième verset du Psaume 36.